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Dans l’Eure, de la firme à la ferme - Libération

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En 2003, elle change de cap. Brutalement. Jusque-là juriste en droit des affaires, Perrine Hervé-Gruyer décide de se lancer dans un projet agricole autosuffisant, «ce à quoi la crise actuelle nous ramène justement», pointe-t-elle aujourd’hui. Elle reprend donc une ferme, au Bec-Hellouin, dans l’Eure, avec son mari Charles, précédemment marin et éducateur. Leur philosophie ? «Produire un maximum de choses soi-même, son alimentation, ses produits d’entretien et d’hygiène, ses vêtements… Sans aucun apport de l’extérieur, c’est très difficile, avoue-t-elle. On ne se passe pas totalement d’énergie extérieure ; on utilise l’énergie solaire, on a fait installer une cuisinière, un chauffe-eau… Car tout ce qui sert à notre vie quotidienne a un impact sur l’environnement.»

«Ignorance». Certes, il leur faut prendre la voiture pour aller chez le dentiste, accompagner les enfants à l’école, ce bref retour au quotidien qui les rattrape. «On a beau être dans la réalité de nos valeurs, nous ne sommes pas des hurluberlus», tranche Perrine. Ils utilisent tout de même ordinateurs et téléphones portables, leurs deux adolescentes sont libres d’effectuer leurs propres choix de vie - «on n’est pas des ayatollahs», plaisante la fermière. Dans leur entourage, quand ils ont franchi le pas, on les a regardés en ouvrant de grands yeux. «Au départ, nous étions des personnes insaisissables. On ne comprenait pas ces citadins qui revenaient à la terre, ces bobos parisiens… Puis l’idée a fait son chemin, et ce qu’on produisait détonnait un peu dans le coin, qui n’est pas une région de maraîchage.»

Ils n’avaient pour seul bagage qu’une «ignorance crasse» quand ils se sont lancés. Mais la certitude que «quelque chose d’unique se tramait là» et qu’il fallait en être. Avec le recul, Perrine en est persuadée, «si on avait jalonné notre chemin, on serait allé vers du plus classique». Leur objectif : «Préserver la nature et avoir une nourriture saine.» Les moyens à mettre en œuvre : «En allant farfouiller par nous-mêmes, on a effectué notre propre synthèse, réussi une façon de faire qui nous correspond, écologiquement et économiquement performante.»

«Authentique». Elle l’assure, «la permaculture, si on n’est pas bons écologiquement, cela ne produit pas suffisamment». Au final, des légumes, des arbres fruitiers, du vinaigre de cidre, du jus de pomme et des confitures. Ils élèvent des moutons, prennent de temps en temps un cochon, mais ne mangent pas beaucoup de viande. Avant d’en arriver là, ils en ont bavé. «On a fait toutes les erreurs possibles et imaginables», raconte Perrine. Avec en filigrane l’obligation ardente de «vivre au pas de temps de la nature», comme le dit poétiquement Perrine, qui corrige aussitôt, pragmatique, «si je me loupe, les erreurs, je ne vais pas les corriger au printemps prochain». Au bout du compte, elle dit vivre un «rythme authentique, plus humain et plus vrai».

Ils ont le souci de transmettre ce qu’ils ont appris, ce concept de «microferme», et ils comptent plus de 150 initiés sur leur modèle. Ils ont «défriché» le chemin, consigné leurs trouvailles dans des ouvrages documentés, dont l’un dépasse le millier de pages, qui font désormais référence (1). Ils savent être «un microbe» comparé à l’agriculture conventionnelle. Mais plus de 500 personnes suivent les notions qu’ils transmettent sur Internet, ce qui leur fait dire qu’un «mouvement est en route». Perrine en est convaincue, le confinement n’a fait que lui donner raison : «Il est évident que chaque village devrait avoir sa ferme.»

(1) Vivre avec la terre et Guérir la terre, nourrir les hommes (Actes Sud).

D.A.


August 23, 2020 at 10:06PM
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La nourriture saine

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